Avec ses « cuisines du cœur », elle a nourri les sinistrés des séismes en Turquie

Le 6 février 2023, la Turquie est secouée par des tremblements de terre. La cheffe Ebru Baybara Demir réagit en mettant en place des cuisines qui permettront de nourrir des milliers de survivants.

La cheffe prend ses quartiers dans des résidences étudiantes et dans des administrations, à Osmaniye, à Kahramanmaraş, à Adıyaman et à Iskenderun, des villes durement frappées par les séismes. La catastrophe fera plus de 50 000 morts, ravageant de nombreux bâtiments et déplaçant au moins 3 millions de personnes dans le sud-est de la Turquie et dans le nord de la Syrie.

« Pour moi, le fait d’aider les autres est très important, et pour cela, j’ai entre les mains la gastronomie comme outil », confie-t-elle à ShareAmerica.

Après les tremblements de terre, des bénévoles affluent des quatre coins du pays pour offrir leurs services à Ebru et travailler dans ses Gönül Mutfağı, ou « cuisines du cœur », comme elle les surnomme. Ce sont des étudiants en cuisine, mais aussi des médecins, des ingénieurs et des enseignants, qui s’engagent dans le respect de l’ « imece », la tradition d’entraide turque. Dans d’énormes marmites et à l’aide d’ustensiles géants, ils préparent des milliers de repas par jour.

Un groupe de personnes posant en photo dans une cuisine professionnelle (Avec l’aimable autorisation de Zeynep Boneval)
Des bénévoles venus de toute la Turquie ont aidé Ebru Baybara Demir (debout, au centre) à préparer des milliers de repas pour les survivants des séismes dans la province d’Hatay, en Turquie. (Avec l’aimable autorisation de Zeynep Boneval)

Les bénévoles font plus que de cuisiner : ils nettoient et transportent des aliments, et distribuent de la nourriture. « Chaque étape, de la préparation de la nourriture à la logistique, se déroule sur une base volontaire », explique Ebru, qui est une ancienne participante au Programme de leadership pour les visiteurs étrangers* (IVLP), du département d’État des États-Unis.

Le programme IVLP fait venir aux États-Unis des leaders en herbe issus de divers secteurs, et leur donne l’occasion de nouer des liens avec leurs homologues américains. Ebru affirme que grâce au programme, elle a découvert les meilleures pratiques à suivre dans les projets qu’elle entreprend.

Depuis l’ouverture de son premier restaurant dans la ville de Mardin, dans le sud-est de la Turquie, Ebru a lancé des programmes sociaux visant à préserver le patrimoine turc* par le biais de la nourriture. Ils offrent aussi des opportunités aux réfugiés de la crise qui fait rage en Syrie depuis 2011.

Dès qu’elle a ouvert son premier restaurant, Ebru a choisi d’embaucher et de former des femmes de la région. Elle a installé l’établissement dans un bâtiment historique dans le but de dynamiser l’industrie touristique à Mardin. Elle soutient également l’agriculture durable par le biais de son initiative « From Soil to Plate ». Le projet distribue dans toute la Turquie des aliments produits par 170 agriculteurs de Mardin et fournit une plateforme pour envoyer de la nourriture aux survivants des tremblements de terre.

Un homme versant de l’huile dans un énorme récipient et une femme mélangeant la mixture (Avec l’aimable autorisation d’Ebru Baybara Demir)
Ebru (à droite) explique que les bénévoles de sa cuisine du cœur ont préparé près de 10 millions de repas dans les deux mois qui ont suivi les tremblements de terre du 6 février. (Avec l’aimable autorisation d’Ebru Baybara Demir)

À la suite des séismes, les États-Unis ont fourni une aide à hauteur de plus de 315 millions de dollars : de la nourriture, une assistance immédiate à la Turquie, et du soutien aux opérations de recherche et de sauvetage ainsi qu’à d’autres opérations de secours en Syrie.

Plusieurs mois plus tard, les États-Unis poursuivent leurs efforts de préservation des sites historiques turcs. Par le biais de son Cultural Heritage Center, le département d’État collabore avec des partenaires internationaux pour établir les priorités de la reconstruction. Selon une estimation réalisée par des experts d’organisations internationales*, plus de 60 % des 2 863 structures du patrimoine culturel turc inspectées ont été endommagées.

Quant aux cuisines du cœur d’Ebru, elles doivent rouvrir en septembre pour servir les étudiants de la région. En outre, la cheffe a été reconnue par le monde culinaire : en juin, Ebru a reçu le prestigieux Basque Culinary World Prize 2023* en hommage à sa capacité à mettre ses talents culinaires au service des défis sociaux.

« Ma carrière est entièrement consacrée à des initiatives qui sont bonnes pour les gens, pour l’environnement et pour la société, et qui couvrent l’ensemble du cycle alimentaire, du sol à l’assiette et vice versa », a déclaré Ebru Baybara Demir après avoir remporté le prix.

Une version de cet article* a été publiée par le Bureau des Affaires éducatives et culturelles du département d’État des États-Unis.

 

*en anglais