Un million de dollars : c’est ce que Bijal Damani pourrait gagner au concours Global Teacher Prize, qui est ouvert aux enseignants du monde entier. Surnommé le « Nobel des salles de classe », le prix est décerné à un enseignant exceptionnel.
Comment cette Indienne s’est-elle retrouvée parmi les 50 finalistes du concours cette année ? L’aventure commence lorsqu’elle decide de changer de carrière. Bijal quitte son poste bien rémunéré de directrice de marketing pour devenir prof d’économie. Qui dit nouvelle voie, dit nouveaux obstacles. À S N Kansagra, la plus grande école privée de Rajkot, en Inde, on lui demande d’enseigner avec la méthode d’apprentissage par répétition, inefficace à son avis. Et ses collègues se plaignent des élèves plus âgés, parfois insolents.
L’enseignante novice se fixe un objectif : doter les jeunes de compétences concrètes en commerce et en marketing. Comment ? En leur proposant de monter et gérer une mini-boutique avec de vrais produits à vendre au public. Ce cours pratique couvrirait tous les aspects du métier : publicité, financement, comptabilité. En dépit des réticences des administrateurs de l’école, l’idée se concrétise. En 2005, les élèves lancent le stand Galaxy Bazaar*, à une date qui coïncide avec un festival hindou important. C’est leur première décision judicieuse au niveau marketing. La seconde, c’est qu’ils vendent des produits provenant de grossistes respectueux des normes sociales et environnementales, et ne manquent pas de le faire savoir.
À la fermeture du stand, les bénéfices s’élèvent à 8 000 roupies, soit 133 dollars. Les élèves décident d’organiser une fête pour célébrer leur réussite. Bijal en profite pour leur donner une petite leçon de maths. L’argent qu’ils « dépensent pour acheter une tasse de café suffirait à nourrir une famille pauvre pendant une semaine », leur dit-elle. Une révélation !
Les élèves décident d’investir les fonds dans l’éducation de leurs camarades moins nantis. « Faire don d’argent qu’on a durement gagné est le premier pas vers la compassion », affirme Bijal Damani.

L’école a aujourd’hui adopté l’idée d’un stand de vente annuel et elle l’a même intégré à son cursus. Quelque 170 élèves y participent et les profits dépassent les 23 000 dollars. Depuis son lancement, le projet a affecté 70 000 dollars à l’éducation de 1 500 filles de milieux défavorisés. Un modèle que d’autres écoles de la région veulent reproduire.
Les élèves de Bijal Damani gèrent également des portefeuilles de placements virtuels. Elle les encourage aussi à chercher des solutions à divers problèmes locaux. Les cours à apprendre par cœur ont été abandonnés depuis longtemps. Bijal se concentre sur l’enseignement de l’inclusion, de la compassion et de la morale. « Les valeurs inculquées à l’âge où ils sont influençables resteront toujours avec eux. »
En effet, les 28 élèves du premier Galaxy Bazaar de 2005 sont aujourd’hui des jeunes professionnels, certains à la tête d’entreprises prospères, et la plupart continuent de soutenir l’éducation de jeunes parmi les plus pauvres.
*en anglais