En images : l’itinéraire du chemin de fer clandestin d’Harriet Tubman

Cette photographie d’Harriet Tubman est affichée dans le Centre d’accueil de l’Underground Railroad State Park qui lui est dédié à Church Creek, dans le Maryland (Département d’État/Astrid Reicken)

L’abolitionniste Harriet Tubman, elle-même une esclave qui a fui en 1849 les maîtres brutaux dont elle était la propriété, va être la première femme, et la première Afro-Américaine, à figurer sur un billet de banque américain : ce sera chose faite en 2020. Les Américains connaissent bien l’histoire de cette « conductrice » qui a facilité l’évasion d’autres esclaves grâce à son « chemin de fer » clandestin, le fameux Underground Railroad. Un parc ouvert* en 2017 qui lui est dédié dans la région rurale du Maryland où elle est née et a grandi fait revivre les leçons apprises à l’école.

Il attire déjà des visiteurs des quatre coins du monde, intrigués par la personnalité de cette femme et son légendaire réseau d’itinéraires clandestins, de lieux de passage et de refuges qu’empruntaient les esclaves en quête de liberté.

Ceux qui découvrent son histoire interrogent Angela Crenshaw, la responsable adjointe du parc : où est la gare ? où sont les voies de chemin de fer ?

Bucktown (Maryland) : un petit chemin mène à la propriété où trimait Harriet Tubman. Née en situation d’esclavage dans le Maryland en 1820, elle s’est évadée en 1849. (Département d’État/Astrid Reicken)

Mais il n’y avait pas de trains. Les esclaves en fuite empruntaient des chemins dans les forêts, la nuit, guidés par la constellation de la Grande ourse qui pointe vers l’étoile polaire et les orientait vers le nord. Quand c’était possible, ils se déplaçaient en bateau pour empêcher les chiens de suivre leur trace. Ils étaient transportés dans des compartiments secrets de coches et se réunissaient dans des endroits déserts, des cimetières par exemple. Souvent, ils se déguisaient. Tout au long de leur périple, ils étaient traqués par des chasseurs d’esclaves et à la merci de tous ceux qui reluquaient la prime promise pour leur capture.

Ce « chemin de fer » sans voies ferrées était un réseau dirigé par des Noirs et des Blancs qui prenaient le risque d’enfreindre la loi pour venir en aide aux esclaves en fuite. L’emploi de mots de code, tels stations (gares) et conductors (conducteurs), servait à masquer leurs activités clandestines. L’implication dans l’Underground Railroad a été l’une des premières formes de désobéissance civile aux États-Unis.

Marché aux esclaves

Cambridge (Maryland) : le palais de justice du comté de Dorchester où les esclaves étaient vendus aux enchères. La nièce de Tubman et ses deux enfants s’en sont enfuis au cours d’une de ses ventes. (Département d’État/Astrid Reicken)

Maison de culte quaker

Denton (Maryland) : la maison de Tuckahoe Neck, construite en 1803, servait de lieu de culte aux Quakers, qui apportaient leur soutien à la section locale de l’Underground Railroad. (Département d’État/Astrid Reicken)

Lieu de rassemblement pour les fugitifs

Preston (Maryland) : le cimetière de Mount Pleasant, un cimetière afro-américain, servait de lieu de rassemblement pour les fugitifs de l’Underground Railroad. (Département d’État/Astrid Reicken)

Embarcadère

Church Creek (Maryland) : les esclaves en fuite connaissaient bien la région aux alentours de Little Choptank River, qui était un point d’embarquement. (Département d’État/Astrid Reicken)

« J’ai été la conductrice du chemin de fer clandestin pendant huit ans, et je peux dire, contrairement à la plupart des conducteurs, que mon train n’a jamais déraillé et que je n’ai jamais perdu de passager », a dit un jour Harriet Tubman, sur un ton mi-sérieux mi-plaisant.

Beaucoup d’esclaves en fuite allaient retrouver William Still, un Noir affranchi de Philadelphie qui était l’un des plus importants « conducteurs » de l’Underground Railroad. Dans ses mémoires, il fait observer que beaucoup craignaient pour la sécurité de Harriet Tubman parce que ses expéditions duraient plusieurs semaines. Mais « elle semblait entièrement dénuée de peur pour sa personne. L’idée d’être capturée par des chasseurs d’esclaves ou par des esclavagistes semblait ne lui être jamais venue en tête. Apparemment, elle était invulnérable face à tous ses adversaires. »

Two views of small store, outside and inside (State Dept./Astrid Reicken)
Harriet Tubman se trouvait dans le petit commerce du village de Bucktown quand un poids lancé un propriétaire d’esclaves en direction d’une autre personne l’a atteinte à la tête. Elle a été presque tuée et a souffert de ce traumatisme crânien jusqu’à la fin de ses jours. (Département d’État/Astrid Reicken)

Pendant la Guerre de Sécession, de 1861 à 1865, Harriet Tubman a joué le rôle d’éclaireuse, d’espionne et d’infirmière. Elle a aussi mené une expédition armée en Caroline du Sud qui a permis de libérer plus de 700 esclaves. Plus tard, elle a continué à mettre en pratique sa passion pour la liberté en défendant vigoureusement le suffrage des femmes, et elle a forgé des liens d’amitié avec des personnalités de ce mouvement, telles Susan B. Anthony et Emily Howland.

Lorsque Jacob Lew, qui était le secrétaire au Trésor, a annoncé la décision de faire figurer le portrait de Harriet Tubman sur les nouveaux billets de 20 dollars, il a déclaré qu’elle « était non seulement un personnage historique, mais aussi un exemple de leadership et de participation à notre démocratie ». Aujourd’hui, plus de cent ans après sa mort en 1913, Harriet Tubman est sur le point de devenir l’un des visages les plus célèbres des États-Unis.

 

*en anglais