
Ida B. Wells, une journaliste d’enquête qui, au péril de sa vie, a exposé les horreurs du lynchage vers la fin des années 1890, a reçu cette semaine une citation spéciale posthume du prix Pulitzer* en récompense de ses reportages percutants, source d’inspiration pour des générations de journalistes.
Le jury a ainsi rendu hommage à cette femme remarquable pour ses « reportages exceptionnels et courageux sur la violence horrible et perverse à l’encontre des Afro-Américains à l’époque des lynchages ». La citation s’accompagne d’un legs d’au moins 50 000 dollars. Les bénéficiaires du legs seront annoncés à une date ultérieure.
Le conseil d’administration du prix Pulitzer a annoncé cet honneur lundi dernier, au lendemain de la Journée mondiale de la liberté de la presse. Pour un grand nombre de gens, l’œuvre d’Ida Wells définit la liberté de la presse.
La journaliste a dénoncé avec courage les atrocités commises contre son groupe racial à une époque où les femmes n’avaient pas le droit de vote. Ses enquêtes, dévoilées bien après l’abolition de l’esclavage, ont révélé les méthodes violentes employées par des groupes de Blancs pour maintenir leur domination sur les Afro-Américains.

« La seule chose qu’elle avait, c’était la vérité », a déclaré Michelle Duster, son arrière-petite-fille, au Chicago Tribune*. « Et le journalisme lui a servi d’outil non seulement pour rapporter ce qui se passait, mais aussi, au mieux de ses capacités, pour influencer un changement social. »
Née dans l’esclavage au Mississippi en 1862, Ida Wells a ouvert la voie aux militants et reporters des générations à venir.
Elle a participé au lancement de la croisade nationale contre les lynchages à Memphis, dans le Tennessee, où elle était copropriétaire, rédactrice en chef et reporter du journal Free Speech and Headlight. Elle a publié des articles condamnant les meurtres extrajudiciaires. Elle a passé plusieurs mois à sillonner le Sud, toute seule, pour enquêter sur des centaines de lynchages.
Quand les locaux de son journal ont été saccagés par une foule en colère, elle a décidé de quitter Memphis une fois pour toutes. Elle s’est installée à Chicago, où elle a publié les résultats de ses enquêtes dans deux livrets, Southern Horrors (1892) et A Red Record (1895), un rapport riche en détails et données chiffrées.
*en anglais