Grâce à internet, la musique résonne encore dans ces clubs et salles de jazz fermés au public en raison de la pandémie de coronavirus.
Au légendaire Village Vanguard* à New York, un temple du jazz depuis 1935, des musiciens se sont produits en respectant la distance sociale de juin 2020 à la mi-février 2021. Filmés par trois employés du club, leurs concerts étaient diffusés en direct tous les week-ends, raconte la propriétaire du lieu, Deborah Gordon.

Le streaming de concerts est en pause pendant que le club améliore son système de ventilation afin de mieux protéger les employés et les clients des microbes présents dans l’air. En attendant sa réouverture en septembre, le club en profite pour rediffuser des anciens concerts.
Les internautes paient 10 dollars pour voir un spectacle en ligne, et beaucoup n’hésitent pas à faire des dons supplémentaires. « Tout le monde sait à quel point c’est difficile, souligne Deborah Gordon. En fait, la communauté du jazz est extrêmement engagée, unie et généreuse. »
Hommage à un patriarche défunt
À La Nouvelle-Orléans, le Snug Harbor Jazz Bistro* n’a vraiment commencé son programme de streaming en ligne qu’en avril 2020, lorsqu’il a produit et diffusé un hommage d’un mois à Ellis Marsalis. Le pianiste, professeur de jazz et patriarche de l’une des plus célèbres familles musicales de la ville, était aussi une figure du club. Au début de 2020, il avait annoncé qu’il allait réduire la fréquence des spectacles hebdomadaires qu’il donnait au Snug Harbor depuis des années. Peu de temps après, le 1er avril 2020, il est décédé de la COVID-19 ; il avait 85 ans. Sa mort a poussé le club à lancer une série-hommage au musicien, faite de 12 volets qui se sont étalés jusqu’en juillet 2020.
« On le faisait le vendredi, le jour où il jouait normalement au club, explique Jason Patterson, le directeur musical de Snug Harbor. C’était le patriarche du club. »

Le Snug Harbor a relancé ses concerts en ligne en février dernier avec des spectacles virtuels à 15 dollars, diffusés en direct depuis la scène du club et filmés par quatre caméras.
Des concerts qui provoquent parfois de fortes émotions chez les musiciens. « Les groupes nous remercient constamment, surtout après qu’ils ont joué, confie Jason Patterson. Ils sont euphoriques ; ils n’ont pas joué depuis un an. »
Persévérer coûte que coûte
Le programme de streaming intitulé Jazz at Lincoln Center* n’a cessé d’évoluer depuis mars 2020, date à laquelle le centre s’est mis à diffuser sur sa page Facebook des concerts gratuits de musiciens jouant chez eux.
« Jazz at Lincoln Center a pris très vite la décision de basculer sur autre chose, et on a décidé aussi qu’on n’arrêterait pas nos activités », se souvient Gabrielle Armand, la vice-présidente de la marque, des ventes et du marketing. « Avoir la musique était presque un soulagement. »
Plusieurs mois plus tard, le centre basé à New York a commencé à faire venir des groupes dans sa salle de spectacle, le Dizzy’s Club, et à diffuser les concerts aux spectateurs en échange d’une contribution suggérée de 10 dollars. Son orchestre, le « Jazz at Lincoln Center with Wynton Marsalis » (l’un des fils d’Ellis Marsalis) se produit actuellement en toute sécurité sur la scène centrale et prépare plusieurs concerts virtuels qui seront diffusés aux spectateurs munis d’un billet.
« Il y a de l’enthousiasme à l’idée de revenir sur place, déclare Mme Armand. Il y a de l’optimisme. »
L’enthousiasme a également gagné le public. Chaque mois, plus de 10 000 nouveaux spectateurs suivent les représentations. Et les spectateurs ont aussi fait des petits dons à hauteur totale de 100 000 dollars.
« Le jazz est un langage universel, se réjouit Mme Armand. Ça parle à tout le monde. »
*en anglais