« La meilleure chose à faire pour former un entrepreneur, c’est de lui redonner confiance en lui-même », a expliqué Magatte Wade lors d’un webchat organisé le 19 mars par l’ambassade des États-Unis à Abidjan.

Une discussion passionnée, aux allures de plaidoyer en faveur de l’esprit d’entreprise : car pour Magatte Wade, rien – pas même le manque de moyens financiers – ne doit arrêter les jeunes entrepreneurs.

« On y croit jusqu’à la preuve du contraire. (…) Et arrêtez de toujours croire que c’est l’argent qu’il vous faut au départ pour lancer votre société ! », martèle-t-elle.

Il faut commencer le plus petit possible

D’origine sénégalaise, Magatte Wade monte sa première affaire à San Francisco : un commerce de jus de fruits naturels. Sa réussite, dit-elle, tient à la stratégie du bootstrapping :

« Il faut commencer le plus petit possible. Déjà, parce que ce sera moins intimidant, ensuite parce que vous aurez besoin de moins d’argent, et si vous faites des erreurs à ce niveau-là, elles vous coûteront moins cher. »

Magatte Wade, souriante, devant sa boutique Tiossan (Crédit : Tiossan)
Magatte Wade, fondatrice et PDG de Tiossan. (Crédit : Tiossan)

Aux entrepreneurs sans moyens financiers, Magatte Wade conseille de commencer par créer un prototype de leur produit.  « Présentez-le à votre entourage et à des entrepreneurs accomplis. Et demandez-leur s’ils veulent investir. »

Vous craignez de vous faire voler votre idée ? « Ce n’est pas l’idée qui importe, c’est l’exécution », rétorque-t-elle.

Autre solution pour trouver des fonds : présenter son projet sur les sites de crowdfunding. Magatte Wade déconseille de solliciter les banques. « Une banque, par définition, ne prend pas de risque », rappelle-t-elle.

L’entrepreneur ne peut pas être un suiveur

Mais l’ingrédient essentiel au succès des entrepreneurs africains, selon elle – c’est la confiance en soi. « L’entrepreneur ne peut pas être un suiveur. Il doit penser par lui-même, refuser le statu quo. »

Face à des parents ou des aînés sceptiques, voire critiques, elle enjoint les jeunes de faire preuve de courage. Être entrepreneur, c’est accepter d’être incompris, et résister au rejet et à la peur, assène-t-elle.

« La dernière barrière, c’est la barrière mentale. (…) Que vous ayez fréquenté ou non le système scolaire traditionnel, cultivez votre originalité. »

Créez-vous votre propre écosystème

Pour Magatte Wade, l’esprit d’entreprise ne s’apprend pas à l’école. Et « ce n’est pas parce que vous n’avez pas fait d’école de commerce que pour vous, tout est cuit », assure-t-elle.  

Elle invite les jeunes pousses à s’entourer d’autres personnes habitées par cette mentalité d’entrepreneur, qui surmonte les obstacles : « Lisez les biographies d’entrepreneurs d’Afrique et du monde. (…) Et créez-vous votre propre écosystème. Créez un mini-club, par exemple, pour échanger des solutions. »

Magatte déplore la mentalité de l’Afrique francophone qui dénigre ce qui est commercial. « Mais il n’y a rien de mal à vouloir gagner de l’argent, réplique-t-elle (…) On a tous envie de vivre de notre travail, qu’il s’agisse de l’art ou d’autre chose. » Cependant, c’est la passion qui doit mener l’entrepreneur, pas le désir de devenir riche, précise-t-elle.

Gros plan sur les mains d'une personne transposant du beurre de karité d'un bol vers un tupperware avec une sorte de truelle (Crédit : Daveynin / Flickr)
Du beurre de karité africain 100 % naturel. (Crédit : Daveynin / Flickr)

Aujourd’hui, Magatte Wade est à la tête de sa deuxième entreprise : Tiossan, une société de produits de beauté naturels de luxe. Une ligne fabriquée à partir d’ingrédients et de recettes d’origine africaine, tout comme l’étaient ses boissons. Car pour elle, l’Afrique a hérité d’immenses richesses qu’il suffirait de remettre au goût du jour. « Le monde entier peut être refait à l’africaine », s’exclame-t-elle.

Aux jeunes entrepreneurs africains de se mettre au travail ! Comme disait sa grand-mère : « Ce qu’un autre être humain peut faire, toi aussi, tu peux le faire, et faire encore mieux. »