Pour protéger l’une des dernières prairies du monde, un parc du Montana a décidé de gérer ses grands espaces en s’inspirant du monde des affaires.
Le parc en question, l’American Prairie Reserve, est un partenariat entre le secteur public et le secteur privé qui réintroduit dans la prairie du Montana des bisons, des antilopes, des ours, des wapitis et d’autres icônes de la faune américaine.
Ce groupe rachète les ranchs privés des propriétaires qui sont disposés à vendre et il bénéficie également de dons privés. Le but de la réserve est de raccorder des terrains pour en faire un océan de verdure à la disposition des visiteurs et des animaux sauvages.

En regroupant des terres privées et publiques, l’American Prairie Reserve aspire à devenir moitié plus grand que Yellowstone, le parc national le plus ancien des États-Unis, et également l’un des plus vastes.
La différence entre l’American Prairie Reserve et les autres parcs des États-Unis, c’est qu’il ne dépend pas uniquement du gouvernement fédéral ni de l’État du Montana. La réserve se veut hybride, associant des terres publiques à des ressources privées, et elle gère le parc un peu à la manière d’une entreprise pour se procurer des terrains et faire prospérer le parc.

Terres, faune et hommes
La réserve elle-même est sans but lucratif. En revanche, ce n’est pas le cas de Wild Sky, une entreprise de production de bœuf à la périphérie du parc, gérée par la réserve.
Les éleveurs de bétail de Wild Sky acceptent de modifier certaines de leurs pratiques – ils protègent les chiens de prairie ou installent des clôtures qui ne risquent pas de blesser les animaux sauvages, par exemple. Les recettes des ventes de bœuf de Wild Sky sont partagées entre les éleveurs et la réserve.
« Protéger la prairie représente bien plus que protéger un écosystème menacé. C’est protéger un style de vie qui est en train de disparaître », a déclaré il y a quelques mois l’ancien sénateur américain Alan Simpson, un républicain qui a représenté le Wyoming pendant 18 ans.

À une certaine époque, les éleveurs de bétail voulaient tenir leurs bêtes à l’écart des prédateurs. Or on sait que la présence de cougars, d’ours et d’autres prédateurs est synonyme d’écosystèmes sains. Alors, pour favoriser le bien-être des animaux sauvages tout en rendant service aux éleveurs des alentours, la réserve rétribue ces derniers pour qu’ils installent des caméras sur leurs terres et prennent des photos des animaux. Une bonne affaire pour les gardes forestiers de même que pour les éleveurs et les agriculteurs, qui sont plus enclins à offrir leurs prairies en pâturage.
Le système de compensation est basé sur celui du même type de programmes de protection des panthères des neiges au Népal et des guépards en Namibie.

David Crasco, descendant de cinq générations d’éleveurs de bétail et membre de la tribu indienne des Assiniboine, se dit fier que les cougars et les ours viennent vivre sur les terres de son ranch. « Mon peuple a toujours vécu en osmose avec la nature. C’est bien comme ça », confie-t-il.
La réserve œuvre à rétablir l’intégralité de l’écosystème de la prairie, y compris des loups, des mouflons canadiens, des serpents et des renards véloces.
À certains endroits, explique Hilary Parker d’American Prairie Reserve, il n’y a pas de bâtiments à plus de 150 km à la ronde. Cet état sauvage attire les randonneurs, les campeurs et les chasseurs à la recherche de beauté naturelle.
Alison Fox, directrice de la réserve, est tombée amoureuse de la prairie à cause de l’immensité du Montana. Pour elle, « la manière dont le paysage se révèle au fil du temps est une source d’inspiration inépuisable ».